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Plongeon dans l'illogisme : les passages piétonniers et cyclistes

Le Code de la Route a ceci de particulier qu'il est conçu de manière à être le plus constant possible dans ses directives. En combinaison avec les normes du Ministère des Transports du Québec, il fait en sorte de minimiser la prévalence de situations surprenantes ou déconcertantes. C'est très bien ainsi : après tout, personne ne voudrait d'un Code de la Route qui ne soit pas prévisible. Là où le bât blesse, c'est lorsque l'on s'intéresse aux installations destinées aux cyclistes. Dans ce billet est exposé ce qui constitue probablement le pire illogisme : les passages piétonniers et les cyclistes.
 

Revenons aux bases

Posons tout de suite les prolégomènes : il est, par défaut, interdit aux cyclistes de passer sur les feux piétonniers (comme sur tous les feux rouges d'ailleurs). Le Code de la Route est très clair là-dessus :

359. À moins d'une signalisation contraire, face à un feu rouge, le conducteur d'un véhicule routier ou d'une bicyclette doit immobiliser son véhicule avant le passage pour piétons ou la ligne d'arrêt ou, s'il n'y en a pas, avant la ligne latérale de la chaussée qu'il s'apprête à croiser. Il ne peut poursuivre sa route que lorsqu'un signal lui permettant d'avancer apparaît.

De même, les cyclistes doivent (au sens d'une obligation) passer sur le feu vert. Il leur est interdit de s'y arrêter :

363. À moins d'une signalisation contraire, face à un feu vert, clignotant ou non, le conducteur d'un véhicule routier ou d'une bicyclette doit, après avoir cédé le passage aux véhicules routiers, aux cyclistes et aux piétons déjà engagés dans l'intersection, poursuivre sa route.

Où ça se complique

Jusque là, tout semble clair, net et logique. Malheureusement, le petit "à moins d'une signalisation contraire" est venu faire des siennes... On s'est aperçu que parfois, faire passer les automobilistes en même temps que les cyclistes pouvait être dangereux. Oh! pas parce qu'il serait formellement impossible de cohabiter. Non, simplement parce que plutôt que de forcer les automobilistes à tenir compte de la présence des cyclistes, on a décidé de retarder ces derniers en installant ce genre de panneaux :

panneau_feupieton_cycliste.pngCe panneau, en apparence anodin, renverse totalement le comportement légal des cyclistes. Cette fois, passer au feu vert est interdit et passer au feu rouge (piétonnier) est obligatoire. Ça n'a absolument aucun sens. Que je sois clair : je ne discute pas de la légalité de tels panneaux, mais de leur logique. Le panneau suivant (fictif) serait lui aussi tout à fait valable d'un point de vue législatif :

voiture_feurouge.pngUn tel panneau indique que les automobiles ont l'obligation de passer sur le feu rouge et l'interdiction de passer à tout autre moment (feu vert ou jaune). C'est tout à fait clair si l'on s'intéresse uniquement à la sémantique du panneau. Néanmoins, est-ce que ce serait une bonne idée d'installer un tel panneau? J'en doute fort.

C'est la même chose pour les cyclistes. Le problème n'est pas le panneau en soit, mais le double message qu'on leur sert : passer sur un feu piétonnier à vélo, c'est criminel, sauf à certains endroits où c'est obligatoire. Je ne cautionne pas les gens qui passent entre les piétons au centre-ville, alors que le feu piétonnier est actif, mais après s'être fait répéter ad nauseam par les sympathiques Vélo-Sécur qu'il fallait toujours passer sur le feu piétonnier (sur le Corridor des Cheminots par exemple), ne peut-on pas considérer qu'il y a un léger paradoxe dans le fait de déchirer sa chemise parce qu'un cycliste passe sur le feu rouge?

Jouons un peu : êtes-vous un vil délinquant à responsabiliser?

Parfois, les aménagements sont d'un illogisme qui frise le ridicule. Voyez-vous, si vous voulez être un bon cycliste, respectueux des lois, des bonnes moeurs et des contribuables, vous devez apprendre à éviter les "pièges".

Situation #1 : Boul. du Versant-Nord

Par exemple, dans la situation suivante (croisement du Boul. du Versant-Nord et Robert-Bourassa), que devriez-vous faire afin de respecter la loi?

IMG_20150613_172657.jpgVous avez dit presser sur le bouton d'activation du feu piétonnier (situé à portée de main, à droite de l'image), attendre le déclenchement de celui-ci derrière la ligne d'arrêt et passer par la suite en laissant la priorité aux éventuels piétons? Vous avez tort, vil délinquant (ou vile délinquante) que vous êtes! Il n'y a pas de panneau indiquant que les cyclistes ont l'obligation de passer sur le feu piétonnier; par conséquent, en vertu des articles 359 et 363 vus plus haut, vous avez l'obligation de passer sur le feu vert. Je répète, histoire d'être bien certain que tout cela est clair : sauf si des véhicules sont engagés dans l'intersection, un cycliste arrivant à cette intersection doit passer sur le feu vert sans s'arrêter, sous peine de contrevenir au Code de la Route. Tout cycliste attendant le feu piétonnier et y passant sur son vélo commet ici une infraction.

Situation #2 : Piste cyclable de la 4e Avenue (Limoilou)

Vous êtes à ce coin de rue, avec la configuration de feux de circulation suivante, et vous souhaitez aller tout droit :

IMG_20150615_194037.jpgQue devriez-vous faire? Cette fois-ci, vous devez vous arrêter au feu vert et attendre le feu piétonnier. Même si vous voulez aller tout droit. Même si vous voulez tourner à droite. Le panneau n'est pas très visible, mais il est bel et bien là, juste de l'autre côté de la rue. Que vous puissiez continuer en ligne droite sur la verte sans problème n'a aucune espèce d'importance. Si vous n'arrêtez pas sur la verte, pour attendre le feu piétonnier, vous êtes en infraction.

Situation #3 : Axe Père-Marquette (Vélo-Boulevard)

Vous êtes prêts pour une autre mise en situation? Allons-y! Vous êtes sur l'axe Père-Marquette, ex Vélo-Boulevard, et votre chemin croise l'avenue Holland. Voici le croisement en question :

IMG_20150615_185157.jpgIMG_20150615_185224.jpgVous souhaitez poursuivre en ligne droite : que devriez-vous faire? Attendre le feu vert ou passer sur le feu piétonnier?

Dans ce cas-ci, l'analyse est difficile, je l'admets. Il n'y a aucun panneau indiquant aux cyclistes l'obligation (et donc la possibilité) de passer sur le feu piétonnier. Par contre, la borne de déclenchement située à portée des cyclistes indique clairement l'intention des concepteurs de faire passer vélos et piétons simultanément. Ceci étant dit, cet affichage n'en est pas un réglementaire, il n'a pas force de loi. En l'état, et du meilleur de mes connaissances, un cycliste passant sur le feu piétonnier pourrait être interpellé par un policier pour le non-respect de l'article 359 du CSR. La défense d'un tel cycliste serait probablement facilitée par l'analyse produite dans ce paragraphe, comme quoi le but de toutes ces installations était clairement de faire passer les cyclistes sur le feu piétonnier, c'est un fait. Mais dans tous les cas, une amende pourrait être donnée par un policier particulièrement scrupuleux. Dans tous les cas, passer sur la verte est légal pour un cycliste. Malheureusement, dans ce cas-ci, nous sommes en présence d'un feu commandé par des détecteurs d'automobiles, qui ne sont pas actionnés par les cyclistes...

Mise à jour (juin 2016) : à un certain moment entre le 2 décembre 2015 et le 30 mars 2016 (soit la période où j'ai remisé mon vélo pour l'hiver), la ville de Québec a remplacé le bouton de commande du feu piétonnier. Il ressemble maintenant à cela :

IMG_20160418_181315.jpgL'étau se resserre, amis cyclistes, l'étau se resserre...

Situation #4 : Corridor des Beauportois, Avenue Saint-David

Reprenons notre postulat initial : vous êtes un cycliste respectueux des lois, et louez le Ciel chaque jour pour la bonté dont font preuve à votre égard certaines stations de radios de la région de Québec, qui vous informent sans relâche de manière objective et neutre sur comment être un meilleur citoyen encore. Vous êtes au carrefour suivant, où le feu piétonnier est en fonction. Vous savez que la piste cyclable reprend de l'autre côté de la rue, à gauche. Vous voyez également deux cyclistes traverser l'intersection :

IMG_20150725_112609.jpg

Que devriez-vous faire?

A) Suivre ces cyclistes et passer prudemment sur le feu piétonnier

B) Attendre le feu vert et vous débrouiller pour traverser le carrefour, avant de rattraper les deux délinquants à responsabiliser que sont ces cyclistes et de les sermonner vertement à propos de leur non-respect du Code de la route et des contribuables.

C) Vous ne pouvez pas passer à cette intersection, vous faites donc demi-tour.

D) La réponse D.

La bonne réponse est... B (enfin, vous n'êtes pas forcément obligé de sermonner les deux criminels à pédale, mais quand même, ce serait mieux, par exemple vous pouvez apporter avec vous un klaxon et le faire retentir au pire moment possible pour être bien certain que ces cyclistes tombent et se fassent mal, retenant ainsi nécessairement la leçon). Pourquoi B? Parce qu'il n'y a aucun panneau autorisant les cyclistes à emprunter le feu piétonnier -- j'ai volontairement pris un plan large de l'intersection afin de montrer que ce n'est pas simplement la photo qui ne le montre pas -- et donc qu'il leur est obligatoire de passer sur le feu vert et interdit de passer sur le feu piétonnier.

À la limite, un cycliste pourrait rester dans la légalité s'il descend de son vélo et traverse l'intersection en marchant, ce qui est profondément incohérent puisque, je le rappelle, nous sommes sur une piste cyclable, mais néanmoins légal.

Situation #5 : Boulevard Jean-Talon et Avenue de Laval, Charlesbourg

Amusons-nous encore un peu. Considérant le croisement suivant et la configuration des feux de circulation à ce moment, que devrait faire un cycliste voulant respecter le Code de la route?

IMG_20150905_100138.jpgAttendre prudemment le feu piétonnier? Que nenni. Il est dans l'obligation de passer sur le feu vert, puisque aucune signalisation n'indique le contraire. Soyons clair : il n'a pas le choix, il doit passer sur la verte. S'arrêter parce qu'il juge la situation dangereuse est tout aussi illégal qu'un automobiliste restant immobile au feu vert. Peu importe sa sécurité, le cycliste doit traverser l'intersection, il n'a pas d'autre alternative légale. Idiot? Peut-être, mais c'est la loi.

Situation #6 : Boulevard Lebourneuf, Charlesbourg

Vous roulez tranquillement sur la piste cyclable bordant le boulevard Lebourneuf, et vous arrivez au croisement suivant :

IMG_20140914_165540.jpgLa photo est un peu petite, je m'en excuse, mais vous pouvez cliquer sur celle-ci pour l'agrandir et mieux voir le croisement en question. Bref, que devez vous faire? Ah oui pardon, je reformule la question : que devriez-vous faire si les automobilistes avaient respecté leur ligne d'arrêt (située avant le trottoir) au lieu d'empiéter sur le trottoir et la piste cyclable? Considérant qu'il y a une lumière verte exactement en face de la piste et manifestement dédiée à celle-ci, la logique voudrait que vous puissiez passer. Eh bien non! Il y a aussi le fatidique panneau forçant les cyclistes à utiliser le feu piétonnier, si bien que vous devez vous arrêter et attendre. Le feu vert que vous voyez est en fait un piège destiné à attraper les mécréants qui oseraient croire qu'un feu vert qui leur est manifestement destiné indique qu'ils peuvent passer.

Situation #7 : Boul. du Versant-Nord et Avenue du Brabant

Juste pour s'amuser, un dernier exemple délicieusement illogique, signalé par un lecteur que je remercie au passage. La piste cyclable de l'Avenue du Brabant est une piste très courte qui permet aux cyclistes de rejoindre la piste du boulevard du Versant-Nord. Pourquoi est-ce que j'en parle? Parce que l'intersection entre ces deux artères vaut le détour :

IMG_20150919_161550.jpgIMG_20150919_161650.jpgLa première photo montre la piste cyclable en général, tandis que la seconde présente une vue plus détaillée de l'intersection. Après les six situations précédentes, vous avez probablement maintenant un oeil de lynx qui vous a fait repérer immédiatement le panneau forçant les cyclistes à utiliser le feu piétonnier. Mais avez-vous remarqué autre chose, de l'autre côté du boulevard? Comme je suis gentil, je vous ai fait un petit agrandissement :

IMG_20150919_161650_zoom.jpgEh oui! La piste cyclable n'est pas accessible aux piétons, qui doivent utiliser le trottoir sud. Un pannonceau indiquant cette interdiction est donc présent. Mais, en même temps, un feu piétonnier est installé pour permettre aux cyclistes de traverser. Nous avons donc ici un croisement tout à fait kafkaien doté d'un feu piétonnier interdit aux piétons. Si cela ne vous convainc pas de l'illogisme absolu avec lequel les intersections sont gérées pour les cyclistes, je ne sais pas ce qu'il vous faut de plus...

On reprend les mêmes, et...

Toutes ces mises en situation sont difficiles à analyser et profondément incohérentes, mais les croisements représentés sont à tout le moins homogènes. Qu'est-ce que je veux dire par là? Pour le comprendre, prenons un autre endroit, le croisement entre le Corridor des Cheminots et Henri-Bourassa. Voici une vue aérienne du croisement en question (la piste cyclable est mise en évidence en jaune, et les coins sont numérotés, vous verrez pourquoi) :

satellite_25erue_hbourassa_annote.jpgObservons maintenant deux des coins de l'intersection. D'abord, le coin #1 :

IMG_20150614_141118.jpgEnsuite, le coin #2 (autrement dit, juste à côté de l'automobile arrêtée dans le photo précédente) :

IMG_20150614_140912.jpgLa question piège maintenant : considérant ces deux coins d'une même intersection, distants d'une dizaine de mètres à peine, quel comportement un cycliste suivant le Code de la Route doit-il adopter?

  • Pour ce qui est de la situation #1, le cycliste doit demander le feu piétonnier, puis l'attendre avant de traverser l'intersection. Passer sur le feu vert est illégal.
  • En ce qui concerne le coin #2, le cycliste doit passer sur le feu vert. Passer sur le feu piétonnier est illégal.
  • La situation des coins #3 et #4 est similaire. Dans le cas du coin #3, le cycliste doit passer sur le feu vert. Pour le coin #4, il doit attendre le feu piétonnier.

Pourrait-on faire plus schizophrène? C'est la même intersection! Comment les règlements peuvent-ils différer selon le coin sur lequel vous êtes? Dans un cas, passer sur le feu piétonnier est le comportement d'un bon citoyen respectueux des lois et des autres, alors que son homologue qui fait de même à 10 mètres de là, sur le même croisement, est un criminel démontrant la délinquance généralisée des cyclistes!

Conclusion et rêvasseries d'un zoïle

Il est vrai que les policiers n'interpelleront probablement jamais un cycliste traversant sur le feu piétonnier à partir du "mauvais" coin dans l'exemple précédent (encore heureux). C'est déjà ça, mais ça ne change rien au coeur du problème : comment voulez-vous que les cyclistes respectent le Code de la Route si on le leur présente de façon aussi illogique? Comment peut-on imaginer qu'un cycliste se sente redevable envers les autres usagers de la route à partir du moment où le simple fait de vouloir traverser légalement un croisement régi par un feu de circulation impose de se demander systématiquement s'il lui faut passer sur le feu rouge ou le feu vert?

Au final, tout cela découle du fait que nous avons pris le problème initial à l'envers : au lieu de nous demander comment intégrer les cyclistes à la circulation automobile (ce qui a toujours été l'esprit du législateur, c'est patent lorsque l'on s'attarde au Code de la Route), nous nous sommes attardés à les séparer des automobiles et à les rapprocher des piétons. Encore une fois, il n'est pas question de dénigrer les piétons (ni les automobilistes d'ailleurs), mais de constater qu'objectivement, les cyclistes ont bien plus d'affinités (législatives du moins) avec les seconds qu'avec les premiers. Les cyclistes, tout comme les automobiles, doivent respecter un sens de déplacement, signaler leurs changements de direction, gérer les dépassements d'une manière particulière, circuler dans des lignes prédéfinies et non simplement en groupe désorganisé, etc. Tout devrait pousser les cyclistes à être harmonieusement intégrés à la circulation automobile, mais, pour diverses raisons, à commencer par l'incapacité quasi phobique de certaines personnes à reconnaître la simple existence d'un moyen de transport nommé cyclisme, c'est l'inverse qui a été mis en oeuvre.

En l'état, la solution devrait être l'inverse. Au lieu de se demander comment mieux concilier la présence des piétons et des cyclistes, il faudrait au contraire les séparer :

  1. Dans les cas des routes et rues à faible circulation (par exemple dans l'axe Père-Marquette, ou sur la 4e avenue), la solution est très simple : retirez ce fichu panneau obligeant les cyclistes à utiliser le feu piétonnier. Les cyclistes doivent passer sur le feu vert et arrêter sur le feu rouge, tel que dicté par le CSR. Bien évidemment, cela impose de cesser d'utiliser ces horreurs que sont les détecteurs d'arrêt insuffisamment sensibles pour détecter la présence de cyclistes.
  2. Dans le cas des routes à plus haut débit, adapter la signalisation pour que les cyclistes puissent passer au feu vert. Par exemple, dans le cas du croisement Henri-Bourassa / 24e rue vu plus haut, il n'y a aucun problème à ce que les cyclistes passent sur le feu vert de la 24e rue, si ce n'est que les automobilistes tournant à droite ou à gauche doivent être conscients que les cyclistes ont priorité sur eux (à l'inverse, les cyclistes voulant changer de direction doivent céder la priorité aux automobilistes coupant leur route). Bref, comme pour n'importe quelle route.
  3. Dans le cas de croisements uniquement cyclistes (par exemple les croisements sur le Corridor des Cheminots), utiliser des feux spécifiquement pour les cyclistes. Attention, pas des feux piétonniers : non, des feux de circulation, avec une lumière rouge, une jaune et une verte. Ce sont ces signes-là que les cyclistes doivent apprendre à respecter. Pas le feu piétonnier.

Je ne suis pas utopique :  je sais pertinemment que de tels changements ne seront jamais appliqués. Il reste qu'à chaque fois que j'entends des gens râler sur les cyclistes passant sur le feu piétonnier, je ne peux m'empêcher de penser à tous ces croisements, au demeurant tout à fait similaires aux autres, où on leur a inculqué l'importance de... passer sur le feu piétonnier. Je ne prétends pas que ça justifie pour autant un acte illégal, mais, clairement, ça l'explique et, chose certaine, remettre un peu de cohérence dans ces règles d'aménagement que l'usage a transformées en comédie absurde ne ferait certainement pas de mal.

En bonus

Bon, messieurs les urbanistes, ingénieurs et autres planificateurs urbains, vous ne voulez pas changer vos manières de faire, soit. Pourriez-vous au minimum considérer placer le bouton de déclenchement du feu piétonnier du bon côté du poteau?

IMG_20150419_140341_mod.jpg

IMG_20150419_140154.jpgJ'ai pris deux exemples sur le Corridor des Cheminots (croisements 18e rue et Canardière), mais il y en aurait bien d'autres. Il me semble que ce serait dans vos cordes de simplement placer un bouton de déclenchement du bon côté? Dans tous les cas, ça donnerait presque l'impression que vous vous souciez des cyclistes. Génial, non?

Mise à jour (07/11/2015) : le Vélurbaniste a concocté un amusant petit diagramme à ce sujet. Voici donc, graphiquement, les questions que doit se poser tout cycliste à chaque croisement réglementé par un feu de circulation : c'est par ici!

Commentaires

1. Le lundi, mai 30 2016, 10:55 par Fred

Salut,

Excellentes remarques !
Il y a vraiment beaucoup de croisements à Québec où il est difficile de savoir comment traverser à vélo, et on s’aperçoit en fait que cela a tout simplement été très mal conçu.

Par rapport à la situation #1 :
Juste avant le croisement indiqué sur la photo, la piste cyclable traverse le boulevard du Versant Nord. Sauf que pour le traverser du Nord vers le Sud il n’y a pas de panneau P285. Mais il n’y a pas non plus de feu automobile (il y en a uniquement un du Sud vers le Nord). Est-ce que ça veut dire que les vélos ont le droit de traverser dans un seul sens ?

Pour la situation #2 :
C’est un cas que j’ai déjà rencontré ailleurs : si je décide de circuler sur la chaussée et non pas sur la piste cyclable, est-ce que je dois me conformer au panneau P285 et donc m’arrêter, au feu vert, en plein milieu de la chaussée ?
Et inversement, si je suis arrêté à cause du panneau P385, est-ce que j’ai le droit de me décaler de 20 cm sur la gauche, me retrouver sur la chaussée et donc passer ?

2. Le lundi, mai 30 2016, 19:31 par Le zoïle à pédales

@Fred

En effet, cet article, malgré sa longueur, ne fait que survoler les problèmes que les cyclistes vivent. Les réponses qui suivent constituent mes hypothèses quant au comportement à adopter si on tient mordicus à respecter le code de la route (au mépris de notre sécurité et de la logique) :

Pour votre première question, s'il n'y a NI feu de circulation NI panneau P285, alors la piste cyclable doit être considérée comme un chemin en croisant un autre (un peu comme une sortie de stationnement, même s'il n'y a pas formellement de panneau stop, les automobilistes doivent s'y arrêter) et les règles par défaut s'appliquent. Dans ce cas, le cycliste pourrait passer après avoir fait un stop et s'être assuré de ne couper personne. Ceci étant dit, c'est plus facile à dire qu'à faire, surtout considérant la forme de ce carrefour... Dans tous les cas, il y a clairement là un "vide signalétique".

Le second cas que vous exposez se produit en fait assez régulièrement, par exemple le long du Boulevard Henri-Bourassa (qui suit la piste des cheminots). Que je sache, le P285 s'applique à tous les cyclistes venant de la direction dans laquelle il est orienté. Donc, tricto sensu, vous devez vous arrêter sur le feu vert et attendre le feu piétonnier. Oui, au beau milieu de la circulation...

Il est génial ce code de la route, n'est-ce pas?

3. Le vendredi, juillet 22 2016, 00:45 par Yanick

En matière d'incohérence de signalisation pour les cyclistes, voici un bel exemple : https://twitter.com/YanickBeaudoin/...

Pourtant, cette combinaison de panneaux est présente à plusieurs endroits, dont :
https://www.google.ca/maps/dir/46.8...
https://www.google.ca/maps/dir/46.8...!3m1!4b1!4m2!4m1!3e2?hl=fr
https://www.google.ca/maps/dir/46.8...

4. Le dimanche, juillet 24 2016, 01:19 par Le zoïle à pédales

@Yanick

Tout à fait. J'en ai d'ailleurs parlé dans divers articles sur ce blog (concernant l'univeristé Laval ou les arrêts abusifs au Vieux Port). Ces aménagements sont (malheureusement) relativement répandus, et sont précisément, à mon avis, parmi les facteurs pouvant expliquer la nonchalance de la plupart des cyclistes face à la signalisation : si de toute façon ces panneaux sont manifestement installés n'importe comment et sans aucune réflexion, pourquoi devrait-on les suivre? Je n'approuve pas cette démarche -- ça reste illégal -- mais même inconsciemment, ce genre de signalisation absurde affecte la perception qu'ont les cyclistes du CSR.

5. Le dimanche, août 26 2018, 12:28 par Leopold Tapp

Situation no:4
À cette intersection de l'autre côté, il n'y a aucun feux de circulation. Il faut se fier sur les voitures qui s'engagent pour comprendre qu'elles s'engagent sur le feu vert afin de traverser. C'est un non sens.

6. Le dimanche, novembre 11 2018, 07:11 par Asakha

Sauf erreur de ma part, dans le cas #2, le vélo n'est pas dans un cercle vert, il ne s'agit donc pas d'une obligation de traverser sur le feu piétonnier, mais bien d'une permission. De ce fait, il n'y a pas d'interdiction de passer sur un feu vert.

Pour le cas #5, il y a peut-être abus du sens de la loi... Si effectivement, vous devez circuler sur un feu vert, vous ne devez pas le faire si vous vous mettez clairement en danger ! Sinon, que dire des panneaux d'interdiction d'arrêter (P-160-3) situés juste avant un feu rouge ?! On arrête, on est en infraction, tout comme si on continue !
Donc, ici, vous arrivez derrière une voiture qui indique son intention de virer à gauche, vous lui cédez le passage et vous vous engagez à la suite.

7. Le dimanche, novembre 11 2018, 12:48 par Le zoïle à pédales

@Asakha

Excellentes remarques. Voyons les en détail :

> Sauf erreur de ma part, dans le cas #2, le vélo n'est pas dans un cercle vert, il ne s'agit donc pas d'une obligation de traverser sur le feu piétonnier, mais bien d'une permission. De ce fait, il n'y a pas d'interdiction de passer sur un feu vert.

C'est une très bonne observation. En fait, un des problèmes dans cette situation est que ce panneau n'a aucune signification légale. Seul le P-285 (http://www.rsr.transports.gouv.qc.c...) est répertorié et publié à la Gazette officielle du Québec (seul moyen légal d'établir une signalisation selon l'article 289 du CSR). À la limite, on pourrait même considérer que ce panneau ne signifie strictement rien et qu'il est donc interdit aux cyclistes d'emprunter le feu piétonnier à cet endroit...

Mais soit, admettons que ce panneau soit valable et qu'il signifie que les cyclistes peuvent emprunter le feu piétonnier, mais n'y sont pas forcés. On ne vient que d'ajouter une autre couche de complexité à la prise de décision :

- Si un cycliste arrive à un feu vert, il peut passer.
- Sauf si un feu en forme de vélo est présent, ou si un panneau P-285, soit un panneau représentant un feu piétonnier et un cycliste dans un cercle vert, est présent, auquel cas il doit s'arrêter sur la verte
- Sauf si en fait ce panneau (de l'autre côté de l'intersection, en passant) représente la même chose mais _sans_ cercle vert, alors s'arrêter sur la verte est interdit (article 363).

Tout cela en quelques secondes, tout en gérant le reste du trafic autour. Si le cycliste manque un seul de ces indices, il est, de fait, en infraction et peut se mériter une contravention (voir mon article récent à ce sujet). Les avis peuvent diverger à cet effet, mais je ne suis sincèrement pas convaincu que ce que l'on demande aux cyclistes soit raisonable...

> Pour le cas #5, il y a peut-être abus du sens de la loi... Si effectivement, vous devez circuler sur un feu vert, vous ne devez pas le faire si vous vous mettez clairement en danger ! Sinon, que dire des panneaux d'interdiction d'arrêter (P-160-3) situés juste avant un feu rouge ?! On arrête, on est en infraction, tout comme si on continue !

Il y a une énorme différence entre ces deux situations : vous opposez ici danger et impossibilité. L'automobile qui arrive derrière une file d'autos immobiles ne peut tout simplement rien faire d'autre que de s'arrêter, peu importe la signalisation. Le cycliste lui, devrait avoir le droit (et l'obligation) de passer, mais doit s'en abstenir "pour ne pas se mettre en danger", danger provenant, rappelons-le, des automobilistes. C'est loin d'être la seule situation où ce "danger au feu vert" se produit, d'ailleurs : http://www.unzoileavelo.ca/index.ph...

> Donc, ici, vous arrivez derrière une voiture qui indique son intention de virer à gauche, vous lui cédez le passage et vous vous engagez à la suite.

Précisons : le cycliste n'arrive pas derrière, il est à son coin à attendre la verte depuis 3 minutes. Et s'il y a 2 voitures? 3? Vous les laissez toutes passer? Le feu vert à cette intersection dure une quinzaine de secondes. Vous acceptez carrément de ne jamais passer si nécessaire, alors que vous seriez dans votre droit? Plus généralement, pourquoi le cycliste devrait-il céder le passage alors qu'il a priorité? Si vous vous faites couper par quelqu'un arrivant en sens inverse et tournant à gauche, accepteriez-vous que l'on prétende que vous auriez facilement pu éviter le danger, simplement en cédant le passage au véhicule arrivant en sens inverse?

Soyons clair : je ne suis pas de ceux qui veulent "prendre leur place" et "prouver que la loi est de leur bord" en se mettant en danger. Bien sûr que d'interpréter la loi aussi strictement que je le fais est stupide. Personnellement, à ces endroits, je passe sur le feu piétonnier quand même. Parfois sur la rouge, même, s'il n'y a personne sur l'autre avenue et que je ne prends la priorité de personne. Le problème, et la raison pour laquelle j'écris ces articles, c'est que dans ces situations, il semblerait qu'il n'y a plus de ce "gros bon sens" ou de cette "évidence" comme quoi la loi n'a pas à être suivie à la lettre. Oh non, dans ces moments, je suis un délinquant de la pire espèce, qui ne comprends pas que les règles s'appliquent à tout le monde et qui est la source de la mauvaise réputation des cyclistes...

Personnellement, je pense qu'il y a moyen de traverser de manière parfaitement sécuritaire à toutes les intersections illustrées dans cet article. Mais prétendre qu'on peut le faire en respectant la loi à la lettre est, à mon avis, fallacieux et incorrect, et c'est ce que je veux mettre en exergue dans cet article.

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